0-6 mois, 12-18 mois, Autonomie, Montessori

L’acquisition de la continence selon Montessori

J’ai consacré le mois passé à une formation d’Assistante AMI 0-3 ans plutôt intensive qui m’a ouvert les yeux sur de nombreux sujets, dont celui-ci. Il me paraissait important de partager avec vous ce que j’ai appris 🙂

Introduction

Tout d’abord, il est essentiel de comprendre que l’acquisition de la continence est un processus. Ce n’est pas du jour au lendemain qu’un déclic aura lieu et que l’enfant saura uriner ou déféquer ailleurs que sur lui, puisque l’utilisation des toilettes n’est pas « instinctive ». Ce processus commence en réalité à la naissance, et de nombreuses solutions aident l’enfant à devenir le collaborateur de sa propre hygiène : mettre à l’enfant des couches en tissu, parler à l’enfant lorsqu’on le change pour l’engager dans ce qui se produit, identifier les moments-clefs d’élimination et lui proposer le pot, etc… Nous reviendrons en détail sur certaines de ces solutions plus bas en expliquant en quoi elles favorisent l’acquisition de la continence.

Comment se déroule le processus :
Etape 1 – Contrôle de l’intestin pendant la nuit
Etape 2 – Contrôle de l’intestin pendant la journée
Etape 3 – Contrôle de la vessie pendant la journée
Etape 4 – Contrôle de la vessie pendant la nuit

Il est important de comprendre que l’ordre de ces étapes est immuable et universel. En effet, une fois que l’enfant se tient allongé sans recourir à la position foetale, le sphincter anal forme naturellement un angle permettant une continence plus aisée – d’où une possibilité de contrôler l’intestin la nuit en premier. Par la suite, un processus « conscient » s’enclenche, qui nécessite que l’enfant soit éveillé : la continence de jour pour les selles survient car l’enfant peut les sentir plus facilement que l’urine.
Pour les étapes suivantes, il faut également un processus conscient pour que le contrôle de la vessie puisse débuter pendant la journée. L’étape finale de l’acquisition de la continence sera le contrôle de la vessie la nuit, même lorsque l’enfant est en sommeil.

Pour que ce processus puisse se dérouler, plusieurs aspects sont en jeu : l’aspect physiologique, l’aspect psychologique et l’aspect environnemental. En quoi consistent-ils ?

Aspect physiologique

Le contrôle de la continence implique les muscles du sphincter anal et ceux du sphincter vésical. Les mouvements volontaires de ces muscles sont permis grâce au même processus de myélinisation* que le reste du corps.

*La myélinisation du système nerveux est ce qui permet le contrôle des différents muscles du corps. Elle suit deux axes simultanés : du haut du corps vers le bas, et du centre du corps vers la périphérie.

Ces sphincters sont tous les deux situés dans la région pelvienne. Lorsque l’enfant rampe, la myélinisation a forcément atteint les genoux puisqu’il peut contrôler leurs mouvements ; lorsque l’enfant marche, le processus de myélinisation a atteint les pieds. Cela signifie … que l’enfant a déjà la possibilité de contrôler sa région pelvienne, et donc ses sphincters, avant même de marcher ou de ramper.

Le processus de contrôle de ces muscles suit la même logique que pour toute autre évolution physiologique : les sphincters ont besoin de pratique pour pouvoir être contrôlés. Ramper aider à contrôler les muscles dédiés à ramper ; marcher aide à contrôler les muscles dédiés la marche ; essayer de contrôler ses sphincters aide à contrôler sa continence.

Aspect psychologique

Sur cet aspect spécifique, l’adulte est la clé.

Toutes les attitudes et les réactions que nous avons envers les fluides corporels auront un impact sur l’enfant. Si nous sommes dégoûtés par les excréments, l’enfant le prendra personnellement parce que les excréments viennent de lui. Le processus d’acquisition de la continence est aussi naturel que la marche. Il est important que nous faisions la paix avec ce qui sort de notre corps afin de pouvoir accompagner l’enfant de la façon la plus saine et sereine possible.

De même, il est impossible de forcer qui que ce soit à déféquer ou à uriner : crier sur l’enfant ou lui faire honte n’aidera jamais. Notre stress concernant ce domaine stressera l’enfant. Si nous, adultes, réagissons normalement, l’enfant se sentira normal.

Nous devons également penser au fait que l’enfant a vécu une grande partie de sa vie entouré de liquide à l’intérieur de sa mère ; être mouillé ne lui cause pas forcément de dérangement. Pour commencer ce processus d’acquisition de la continence, l’enfant doit d’abord être conscient de la différence entre « être mouillé/humide » ou « être sec ». Et nous voulons que l’enfant comprenne que « être sec » est l’état normal.

Pour cela, les couches en tissu seront d’une grande aide car il est plus facile pour l’enfant :
– d’une part de se sentir mouillé puisque les couches en tissu absorbent moins que les couches industrielles ;
– d’autre part de sentir sec puisque les couches industrielles augmentent la température de cette zone du corps via leurs matières isolantes, et l’enfant se sent humide tout le temps à cause de sa propre transpiration.

La prochaine étape de prise de conscience de l’enfant est de se rendre compte que la sensation humide est liée à la défécation ou à la miction. Avec la couche jetable, c’est impossible pour l’urine car elle est instantanément absorbée. Avec la couche en tissu, l’enfant associe rapidement la sensation interne de miction à la sensation externe d’humidité.

Au début, l’enfant dira « pipi » après avoir uriné. Ensuite, il le dira pendant que cela se produit. Enfin, il le dira juste avant. Et en dernier lieu, l’enfant pourra se retenir de plus en plus longtemps.

Aspect environnemental

Les routines

Les routines de pot peuvent être commencées très tôt dans la vie de l’enfant**. Quand ils sont très jeunes, il existe un réflexe appelé « réflexe gastrocolique » : après avoir mangé, les bébés vont déféquer. Il est donc possible de tenir l’enfant au-dessus d’un pot après les repas. Peu à peu, l’enfant associera le pot à l’endroit naturel pour déféquer ou uriner.

**À la naissance, l’enfant ne peut pas s’asseoir seul, l’adulte peut le tenir par derrière au-dessus du pot en position physiologique (cuisses ramenées vers le torse). Pourquoi tenir l’enfant par derrière ? Car nous souhaitons envoyer le message que déféquer ou uriner n’est pas un moment « social » où nous voyons nos congénères.

Dans la Communauté Enfantine Montessori (âge de la marche assurée jusqu’à 3 ans), il existe une routine à l’arrivée de l’enfant : il ira aux toilettes, se lavera les mains puis ira travailler. Cette routine est mise en place avant d’entrer dans l’environnement car cela demanderait bien trop d’efforts de se concentrer à la fois sur les activités ET sur le contrôle de la vessie. Avant le déjeuner, la même routine a lieu. Après le repas et au réveil de la sieste également.

Les vêtements

Autour de 8 mois, les « culottes d’apprentissage » pourront remplacer les couches. Ces culottes doivent suivre les mêmes principes que les couches et être en tissu. De même, l’idéal est que l’enfant porte des pantalons à taille élastique, rapides à enlever, à remettre et à changer.

La dernière culotte d’apprentissage à être supprimée sera celle de la nuit, conformément à ce qui a été dit plus haut, car il faudra attendre que l’enfant ait atteint la dernière étape du contrôle de sa continence.

L’observation

Dans la Communauté Enfantine, un enregistrement précis des mictions, selles et passages sur le pot est conservé pour chaque enfant. Un tableau codé allant du lundi au vendredi avec les noms des enfants est accorché à portée de l’adulte afin de pouvoir y noter les heures des essais des enfants et pouvoir ensuite identifier les modèles de chacun. Car oui : chacun d’entre eux défèquera ou urinera selon un schéma horaire qui lui sera propre.

Exemple de codage du tableau :
– Heure précise de la tentative de l’enfant
– U = Urine, S = Selles, R = Rien, T = Toilettes, P = Pot, V = « dans ses vêtements »
– Triangle dont on dessine un seul côté si l’enfant est allé aux toilettes de lui-même ; deux côtés s’il a enlevé son pantalon seul ; trois côtés s’il a pu réaliser seul l’ensemble du processus.

Ces schémas de continence de l’enfant peuvent évoluer avec le temps, la météo, les humeurs, etc… Une fois qu’un schéma est identifié (si l’enfant ne travaille pas ou ne dort pas uniquement !), il est possible de l’inviter à aller aux toilettes. Exemple : « Marie, viens avec moi, tu vas aux toilettes ». Lorsque le processus est terminé, indiquer simplement ce qui s’est passé : « Tu as déféqué/uriné » ou « Il n’y a rien dans le pot ». L’enfant doit également avoir la possibilité de s’essuyer lui-même ; dans l’idéal après que l’adulte l’ait fait, car passer après lui pourrait envoyer le message qu’il ne l’a pas fait assez bien.

L’organisation

Les toilettes doivent être organisées de manière à renforcer l’indépendance : une porte facile à ouvrir, un marchepied facile à déplacer pour grimper sur les toilettes ou un pot adapté à sa taille, un panier avec des morceaux de papier toilette prédécoupés par exemple (il est difficile pour l’enfant de se servir seul sans en mettre partout).

L’adulte doit également donner suffisamment de temps à l’enfant. De même, il n’y a pas de récompense ou de punition pour l’apprentissage de la continence, parce que c’est un processus normal. La limite que l’adulte peut appliquer est : si l’enfant urine ou défèque, il doit se changer. Ce n’est pas une punition, c’est juste une conséquence naturelle déroulant de son incontinence passagère, et également la seule façon d’être à l’aise et au sec.

L’enfant doit se changer, mais nous pouvons lui proposer des choix (surtout vers 2 ans lors de la période d’affirmation de soi) : porter la culotte blanche, noire, ou à motifs, les pantalons bleus ou blancs, etc… ; mais il n’est pas question que l’enfant reste dans des vêtements mouillés ou sales.

Être prêt(s)

Dans le Nido Montessori (2 mois jusqu’à l’âge de la marche assurée), les adultes savent que l’enfant est physiquement prêt à s’entraîner lorsqu’il commence à ramper. Mais les parents doivent aussi être prêts à suivre ce processus à la maison. C’est seulement lorsqu’ils viennent avec des interrogations sur le sujet que les éducateurs leur donnent des informations générales sur la façon d’aider, leur parlent des culottes en tissu, du fait que les fuites font partie du processus et ne posent aucun souci au Nido. Ils demandent ensuite à ce que, lorsque les parents seront prêts à entreprendre ce processus à la maison, ils reviennent pour obtenir plus d’informations.

Le but : que les parents suivent également leur propre rythme, travaillent en amont sur d’éventuels blocages face aux fluides corporels, et ne se sentent pas forcés. Car comme nous l’avons vu plus haut, les adultes qui entourent l’enfant sont la clé de tout l’aspect psychologique du processus d’acquisition de la continence.

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